Névrose
"Nous pouvons grosso modo résumer tout ce qui précède dans la formule suivante :les hystériques souffrent de réminiscences. Leurs symptômes sont les
résidus et les symboles de certains événements (traumatiques). Symboles
commémoratifs, à vrai dire. Une comparaison nous fera saisir ce qu’il
faut entendre par là. Les monuments dont nous ornons nos grandes villes
sont des symboles commémoratifs du même genre. Ainsi, à Londres, vous
trouverez, devant une des plus grandes gares de la ville, une colonne
gothique richement décorée : Charing Cross. Au XIIIe siècle, un des
vieux rois Plantagenet qui faisait transporter à Westminster le corps de
la reine Éléonore, éleva des croix gothiques à chacune des stations où
le cercueil fut posé à terre. Charing Cross est le dernier des monuments
qui devaient conserver le souvenir de cette marche funèbre. À une autre
place de la ville, non loin du London Bridge, vous remarquerez une
colonne moderne très haute que l’on appelle « The monument ». Elle doit
rappeler le souvenir du grand incendie qui, en 1666, éclata tout près de
là et détruisit une grande partie de la ville. Ces monuments sont des
« symboles commémoratifs » comme les symptômes hystériques. La
comparaison est donc soutenable jusque-là. Mais que diriez-vous d’un
habitant de Londres qui, aujourd’hui encore, s’arrêterait
mélancoliquement devant le monument du convoi funèbre de la reine
Éléonore, au lieu de s’occuper de ses affaires avec la hâte qu’exigent
les conditions modernes du travail, ou de se réjouir de la jeune et
charmante reine qui captive aujourd’hui son propre cœur ? Ou d’un autre
qui pleurerait devant « le monument » la destruction de la ville de ses
pères, alors que cette ville est depuis longtemps renée de ses cendres
et brille aujourd’hui d’un éclat plus vif encore que jadis ?
Les hystériques et autres névrosés se comportent comme les deux
Londoniens de notre exemple invraisemblable. Non seulement ils se
souviennent d’événements douloureux passés depuis longtemps, mais ils y
sont encore affectivement attachés ; ils ne se libèrent pas du passé et
négligent pour lui la réalité et le présent. Cette fixation de la vie
mentale aux traumatismes pathogènes est un des caractères les plus
importants et, pratiquement, les plus significatifs de la névrose."
Freud, 5 leçons sur la psychanalyse.
(il faut bien entendu comprendre le mot "hystérie" dans le contexte médical de l'époque et non pas dans le sens qu'il a de nos jours)
Ecrit par stupidchick, le Dimanche 28 Décembre 2014, 14:44 dans la rubrique "we can do it".
Commentaires
Un jour...
Volesprit
15-01-15 à 21:20
Faudrait que je lise Freud...
Ça m'a l'air tout juste ce qui est dit.
*Faut pas t'inquiéter~~~~~~*
Re: Un jour...
stupidchick
16-01-15 à 11:57
Hello!